La chute des taux de croissance, la montée des inégalités et de la pauvreté, l’incohérence des évolutions monétaires sont des phénomènes bien réels, et de nature économique. Ils ne font cependant que refléter des déterminants culturels et anthropologiques beaucoup plus profonds. Le déclin éducatif américain, le choc malthusien produit en Europe par l’arrivée des classes creuses à l’âge adulte, l’émergence d’une stratification culturelle inégalitaire, l’affaissement des croyances collectives – parmi lesquelles la nation – définissent ensemble bien plus qu’une crise économique : une crise de civilisation.
C’est dans ce contexte que s’épanouissent la » pensée zéro » des classes dirigeantes françaises et le projet d’une impossible monnaie unique européenne. Mais l’idée d’une contrainte économique agissant » de l’extérieur » sur les Etats-Unis, le Japon, l’Allemagne ou la France, baptisée mondialisation, n’est qu’une illusion. Le sentiment d’impuissance qui paralyse les gouvernements ne sera surmonté que si renaît l’idée de nation.
Pour l’auteur ce n’est pas la mondialisation qui dissout les nations mais l’autodissolution des nations, alimentée par les croyances économiques et idéologiques de certaines élites qui produit la mondialisation. Appuyé sur des analyses souvent pertinentes le livre est explicitement orienté vers une réhabilitation du cadre de décision national mais avec le corollaire du protectionnisme. La thèse à l’évidence mérite débat, entre une légitime volonté de souveraineté politique et les risques de repli identitaire. Le style de l’auteur est alerte et parfois succulent.