– La soucoupe volante m’a parlé.
Elle l’avait dit spontanément. Et maintenant les policiers la questionnaient :
– Qu’entendiez-vous en disant qu’elle vous avait parlé ?
Plus tard, un autre homme vint bavarder avec elle :
– Je ne tiens pas a savoir ce qu’elle vous a dit. Cherchons seulement pourquoi vous en faites un secret.
– C’est à moi qu’elle parlait. Ça ne regarde personne d’autre.
A son procès, on lui dit que la Terre pouvait être attaquée par des êtres venus de l’espace. Elle détenait peut-être la clé de la défense et elle devait tout révéler. Comme elle s’obstinait, on la jugea coupable d’outrage à magistrat et on la condamna. Un beau jour, on la libéra.
Alors elle fit la connaissance d’un homme qui lui demanda un rendez-vous. Mais il ne chercha même pas à l’embrasser. Il voulait seulement savoir ce que la soucoupe avait dit. Elle passa la nuit à pleurer.
Je l’ai trouvée sur une plage, un soir, sous la lune. Je n’avais rien à lui demander. Juste un mot à dire.
Théodore Sturgeon (1918-1985) est un auteur de SF d’une qualité rare, qui s’intéresse avant tout aux humains et à leurs problèmes : le poids de la solitude et de 1a frustration, la difficulté d’être et de s’assumer, la compréhension qui permet aux êtres de se rejoindre. Son secret est « d’écrire une histoire comme s’il s’agissait d’une lettre, et d’une lettre adressée à une personne précise. »