De la nuit froide les soldats sud-africains ont surgi l’arme au poing et vociférant, l’instant d’après ils me plaquent sur le capot leur fusil sur ma tempe et je ne suis plus rien. Les secondes qui suivent sont étrangement longues, où ma vie tout entière défile à la vitesse grand V : l’irréelle Angola des filatures et des bazookas, les caches d’armes creusées jusqu’aux portes de Prétoria, le Zimbabwe des savanes et des meetings secrets, les dispensaires des townships véritables ghettos.
Les hommes de Mandela me confient des missions à haut risque, mais l’intrusion de ces deux brutes va-t-elle faire tout capoter ? Je rage de m’être laissé prendre aussi facilement, eux n’imagineront pas qu’un étranger blanc soit du côté des  » kafirs noirs communistes « .
De nouvelles images se bousculent, l’école kanake du bout du monde, les trottoirs de la mort à Dacca, le Cayenne créole et son Chicago, d’autres visions équatoriales embrasées des couleurs de l’Afrique, la gaieté de ses musiques, la magie de ses forêts, la folie de ses femmes au corps cambré, et plus encore, la fillette zoulou qui égaya de ses rires nombre de mes galères vécues ici-bas.