Toujours aussi musical, mais cette fois davantage pictural, nimbé d’une
« lumière de lait avec une pointe de menthe », le nouveau roman de Christian Gailly est tout entier tendu vers la quête de la pulsion de vie. De la note, de la respiration, du battement de cœur. En l’occurrence celui du compositeur de musique contemporaine Paul Cédrat, dont on joue pour la première fois une œuvre lors d’un important festival d’été, à Zurich, en août 1987… et que le public, cruel, conspue en sa présence. Un échec artistique… autant dire un échec d’amour. Pris d’une lassitude immense, condamné par la maladie, Paul retourne se réfugier à l’hôtel. Sa femme Lucie n’est pas là. Il est seul avec son amertume, face à l’imminence de sa propre mort. Pourtant, le simple fait d’avoir croisé dans l’ascenseur une jolie femme aux yeux injectés de sang aurait dû lui mettre la puce à l’oreille : le sang, c’est la vie, bon sang !
Sommeil. Avion. Une villa en bord de mer. La plage. Une baigneuse. Une rencontre. La prolongation de la vie passe par le désir d’aimer. Deborah Nardis (Nardis ?, déjà entendu ce nom quelque part…) passe un matin lui rendre visite dans un vêtement couleur de sang séché. Pourquoi ? Mais pour un tour dans une Morgan bleue cabriolet, pardi ! Un dernier tour ? Un dernier amour ? Une dernière parade de la beauté avant la mort ? « Regardez-les. Moi quand je les vois comme ça marcher tous les deux côte à côte en se tenant le bras. Difficile de ne pas penser qu’ils formaient ce qui s’appelle un beau couple. »